En novembre 2007, sur la base d’un rapport interne du ministère l’Intérieur, le journal Auto Plus jetait un pavé dans la mare en dénonçant l’utilisation illégale de certains radars.
Selon la réglementation en vigueur et les notices d’utilisation des cinémomètres de type Mesta 208, 210, 1000 et 1200, le radar doit être positionné à 25° par rapport à l’axe de la route pour donner une mesure fiable. Or, le très officiel rapport du ministère de l’Intérieur reconnaît lui-même que les forces de l’ordre ne possèdent pas toujours le matériel nécessaire pour installer correctement leurs appareils de contrôle de vitesse. Le problème est que, si l’angle de visée du radar est inférieur, même de quelques degrés, à 25, la mesure sera majorée jusqu’à 13 % avec le risque pour l’usager de la route d’être verbalisé à tort ou de payer une contravention de classe supérieure.
Largement diffusée dans la presse, cette information a nourri nombres de contestations exigeant l’abandon des poursuites.
Trois mois plus tard, les premières décisions de justice sont tombées.
Certains ont vu leur contestation aboutir, d’autres ont eu moins de chance.
Ainsi, le 28 janvier dernier, le tribunal de police de Melun a condamné un automobiliste à 500 euros d’amende et 5 mois de suspension de permis pour avoir commis un dépassement de plus de 50km/h de la vitesse autorisée.
Le contrevenant avait fondé sa contestation sur plusieurs arguments dont celui du mauvais positionnement du radar, en produisant le fameux rapport du ministère de l’intérieur ainsi que des photos.
La réponse du juge est édifiante :
« Aucune disposition (légale) n’impose aux services de police et de gendarmerie d’indiquer expressément sur le procès verbal la manière dont ils ont procédé à la mise en place de l’appareil radar ». Il faut dire que la loi est plutôt laconique quant aux mentions obligatoires devant figurer sur le procès verbal. L’article 429 du code de procédure pénal dispose simplement que « tout procès-verbal ou rapport n’a de valeur probante que s’il est régulier en la forme ». Dès lors, c’est la jurisprudence qui a, au fur et à mesure des décisions, identifié les informations obligatoires.
Le juge poursuit en reprochant au contrevenant de ne pas avoir apporté la preuve du mauvais positionnement du radar. On touche ici à l’absurdité de tout un système. Car si en matière de crime ou de délit, vous êtes présumés innocent jusqu’à ce que le ministère public prouve le contraire, dans le domaine de la contravention, vous êtes présumés coupable jusqu’à ce que vous vous innocentiez…
Ainsi, si, par malheur, vous êtes flashé par une voiture radar, arrêtez vous et contactez immédiatement votre huissier préféré pour qu’il vienne constater le mauvais positionnement de l’appareil. Pratique, et pas onéreux, surtout pour un léger dépassement de la vitesse autorisée…
Prendre des photos ne sert pas à grand chose. Dans l’affaire de notre automobiliste, les juges ont même trouvé que, sur les photos qui ont été produites, « l’angle de visée apparaissait respecté ». De toute évidence, ils utilisent le même instrument de mesure que les forces de l’ordre : le pif !
Enfin, les magistrats concluent que, même si le radar était mal positionné, la vitesse n’aura pu être majorée que de 13% maximum. Or, le contrevenant ayant été pris à 164km/h, la mesure corrigée aurait été de 142km/h, ce qui représentait toujours un dépassement de plus de 50km/h par rapport à la vitesse autorisée.
Le raisonnement est surprenant. D’un côté, le juge nie tout mauvais fonctionnement de l’appareil ; de l’autre, il en projette les conséquences.
Quelle aurait, alors, été sa décision si le contrevenant avait été flashé à 99 km/h au lieu de 90 ?
Cette décision de justice nous rappelle celle rendue dans l’affaire contre l’Eurolaser. Dans les deux cas, les irrégularités sont flagrantes, mais couvertes par l’autorité judiciaire.
D’autres juridictions seront surement appelées à trancher des litiges similaires. Auto Plus fait mention, dans son édition du 29 avril dernier, d’un cas de relaxe en Ille-et-Vilaine.
Mais il faudra attendre un arrêt d’une juridiction supérieure (cour d’appel ou même cour de cassation) pour avoir une réponse claire qui puisse vraiment faire jurisprudence.
Article paru dans Moto Magazine n°249 - juillet/août 2008
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