En principe, seuls les dispositifs d’échappement homologués peuvent être commercialisés. Il existe toutefois des exceptions pour le matériel destiné aux véhicules de compétition, qui, par définition, ne circulent pas sur la voie publique.
Ce matériel est, dans les faits, facilement accessible et souvent moins couteux que les équipements homologués. Faute d’information suffisante sur les interdictions en vigueur, un motard peut tout à fait acquérir un échappement non homologué en croyant simplement faire une bonne affaire… Une enquête réalisée en 2013 par la DGCCRF dans le secteur de l’entretien et la réparation des deux-roues motorisés a justement pointé le manque d’information des consommateurs sur la non-homologation et les restrictions d’usage de ces pièces.
Peu de motards connaissent également les risques qu’ils encourent lorsqu’ils revendent leur moto équipée d’un pot full barouf. Selon l’article L321-1 du code de la route, la simple mise en vente et, a fortiori la vente, d’une moto qui n’est plus conforme à sa réception (et n’a donc plus ses équipements d’origine) est puni de six mois de prison et de 7500 € d’amende…
Circuler au guidon d’une moto équipée d’un échappement modifié ou non homologué est également répréhensible.
Les forces de l’ordre utilisent plusieurs articles du code de la route pour cumuler les verbalisations.
L’article R318-3 alinéa 1er leur permet de sanctionner le bruit gênant : l’agent apprécie de lui-même, sans qu’il soit besoin de recourir à un sonomètre, si la moto émet un bruit susceptible de gêner les autres usagers ou les riverains. Ce sera évidemment le cas d’un échappement non conforme, mais pas seulement. Ainsi, un motard peut tout à fait être verbalisé sur cette base, même si sa moto est dotée de son pot d’origine ou d’un pot homologué, dès lors qu’il évolue à un régime moteur inapproprié (surrégime, rupteur, etc.). Il encourt alors une amende forfaitaire de 135 €.
Le second alinéa de l’article R318-3 punit de la même peine le fait de circuler avec une moto dont l’échappement, bien qu’étant homologué, a été modifié (retrait de chicane par exemple).
L’article R321-4 alinéa 5 vise spécifiquement l’usage d’un échappement non conforme à un type homologué. Là encore, la sanction tombe sans sortir le sonomètre, mais elle est plus douce et donc moins souvent utilisée… : amende de 11 €.
Cerise sur le gâteau, les forces de l’ordre recourent à l’alinéa 3 de cet article pour sanctionner, de façon globale, la circulation d’un véhicule non homologué. Selon eux, la modification de l’échappement rend, de fait, la moto non conforme, ce qui leur permet d’ajouter une nouvelle amende de 135 €.
Les motards bruyants repartent ainsi le plus souvent avec 3 amendes, dont le total avoisine les 300 €. Ce cumul des contraventions est évidemment abusif car, en pratique, ces 3 contraventions viennent sanctionner un seul acte répréhensible.
Un tel acharnement est forcément contestable. Pourtant, peu de motards se lancent dans une procédure de contestation, sans doute par crainte de se voir infligés des amendes plus sévères en cas de condamnation…
Pourtant des arguments existent.
D’abord, la contravention pour « bruit gênant » peut être remise en cause si l’agent verbalisateur n’a pas précisé la gêne occasionnée. Ces précisions sont impératives pour permettre au juge pénal d’exercer son contrôle sur la réalité de l’infraction. Ainsi, le procès verbal doit indiquer en quoi le bruit de votre moto était gênant. Par exemple : circulation à un régime moteur excessif de nuit dans un quartier résidentiel.
Ensuite, la sanction du fait de la non conformité de la moto apparaît douteuse. L’article R321-4 alinéa 3 vise les « véhicules à moteur ou remorque » qui n’ont pas fait l’objet d’une réception, c’est-à-dire qui n’ont jamais été homologués. Ce n’est évidemment pas le cas de votre moto qui a bien été homologuée, même si c’était avec un autre silencieux d’échappement. Le changement de pot la rend sans doute non conforme à son homologation mais n’annule pas celle-ci de façon rétroactive. D’autres articles du code de la route différencient bien les motos non homologuées de celles qui ne sont plus conformes à leur réception (article L321-1 par exemple). La distinction est d’importance et rendrait, de fait, l’article R321-4 alinéa 3 inapplicable au cas de l’espèce.
Enfin, le cumul d’infractions est, en principe, condamnable au nom de la règle pénale « non bis in idem » qui interdit de réprimer un même comportement au travers de plusieurs qualifications. Ainsi, si l’infraction est caractérisée, il ne doit y avoir qu’une seule sanction et donc, qu’une seule verbalisation.
Dans les prétoires, la réalité n’est toutefois pas aussi évidente et les quelques motards qui se sont essayés à la contestation nous ont informés qu’ils avaient vu leurs contraventions maintenues. Ce ne sont toutefois là que des décisions de juridictions de proximité. Il faudra attendre une décision de Cour d’appel pour commencer à parler de jurisprudence.
En attendant, une chose est sûre : payer, c’est accepter…
Et si le « vivre ensemble » impose à chacun d’entre nous de circuler en respectant les autres et légitime de sanctionner les comportements inadaptés, comme circuler délibérément avec un échappement bruyant, il ne peut justifier des verbalisations abusives.
A retenir :
modifier l’échappement d’une moto rend celle-ci non conforme à son homologation
la non conformité rend répréhensible la circulation de la moto et sa revente
circuler avec un échappement bruyant est de plus en plus souvent sanctionné par 3 contraventions
si le juge rejette votre contestation, il peut vous infliger des amendes d’un montant supérieur (jusqu’à 750 € pour une contravention de 4ème classe dont le montant forfaitaire est de 135 €).