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Pour l’électrique
Quand vous pensez au futur des transports, pensez électrique. Pas d’agrocarburants, pas d’hydrogène, et certainement pas de l’essence, émettrice de dioxyde de carbone. Les véhicules à batteries rechargeables sont bien ce que nous pouvons attendre. Oui, l’Union Européenne maintient que la politique est technologiquement neutre. Oui, les fabricants travaillent également sur des moteurs à hydrogène avec piles à combustible, mais pour faire de l’hydrogène, vous avez également besoin de gaz naturel (hydrogène gris, aussi appelé hydrogène bleu) ou de beaucoup d’énergie dans le processus d’électrolyse (hydrogène propre).
Le gaz naturel se fait rare en Europe, et l’importer de Russie par les oléoducs ou sous forme de gaz naturel liquéfié depuis les États-Unis n’est pas une perspective que tout le monde apprécie. De plus, au cours de son processus de production, beaucoup de CO2 est émis ! Produire de l’hydrogène à partir d’eau et d’oxygène consomme beaucoup, et n’offre pas un bon rendement énergétique pour alimenter les véhicules. Cependant, cette énergie peut être bien mieux stockée que l’électricité, ce qui serait un avantage en cas de surplus de production. Les agrocarburants sont déjà en service en complément de l’essence et du diesel, mais ne sont plus très populaires : leur production se fait au détriment de celle d’aliments. C’est pourquoi des Organisations non gouvernementales (ONG) influentes comme Transport & Environnement font exclusivement la promotion des véhicules électriques à batterie (VEB) et non des véhicules à hydrogène ou à agrocarburant, en particulier les voitures. Il y aura de la place pour les véhicules fonctionnant à l’hydrogène, mais les VEB seront bien plus courants.
Les dates limites
Les transports sont perçus comme grands responsables du réchauffement climatique. Selon l’Agence européenne de l’environnement (AEE), les transports routiers émettent environ 21% des émissions totales de CO2 de l’Union Européenne (UE), le principal gaz responsable de l’effet de serre. Les pays membres de l’UE comme ceux qui ne le sont pas veulent des transports « climatiquement neutres » d’ici 2050. Si cela vous semble loin, rappelez-vous que les voitures - la plus grosse catégorie de véhicules utilisée – ont en Europe une durée de vie moyenne d’environ vingt ans. Pour que toutes les voitures n’émettent plus sur la route en 2050, il faudrait que les voitures thermiques ne soient plus sur le marché après 2030. Ce qui semble tout de suite plus près de nous ! Dans tout juste dix ans, il devrait y avoir une transition complète des voitures à moteur thermique aux voitures à batterie rechargeable. Les gouvernements du Danemark, de l’Allemagne, de l’Irlande, de l’Inde, d’Israël, des Pays-Bas et de la Suisse ont déjà annoncé qu’ils allaient interdire la vente de nouvelles voitures à moteur thermique d’ici 2030. La France, la Chine et le Royaume-Uni se sont positionnés pour 2040. La Norvège, quant à elle, vise 2025. Évidemment, il est question de voitures, pas de motos. Mais soyons réalistes, quand les ventes de voitures à moteur thermique s’arrêteront en 2030 - tout comme les cyclomoteurs concernés aux Pays-Bas - quelle est la probabilité qu’une exception soit faite pour les motocycles ?
Cela va-t-il arriver ?
Jusqu’à présent, j’ai exprimé les positions des gouvernements et des organisations non gouvernementales. Mais sont-elles réalistes ? Y aura-t-il assez de véhicules sur le marché ? Y aura-t-il assez d’électricité, et le réseau pourra-t-il faire face à la demande supplémentaire et aux fluctuations ? Commençons avec les véhicules.
A l’heure d’écrire cet article, le quotidien internet Automotive News Europe contenait neuf articles de fond. Six d’entre eux concernaient des voitures électriques. Chaque semaine, les constructeurs annoncent de nouveaux modèles électriques : Volkswagen transforme une énorme usine à Zwickau pour construire des voitures électriques, plusieurs constructeurs (groupe PSA, Renault, groupe VW) ont annoncé que leurs voitures de classe A actuelles n’auront probablement pas de successeur avec un moteur thermique. L’industrie de la moto est un peu plus lente, mais pas inerte : en Chine, il y a déjà une forte baisse du nombre de motocyclettes à moteur thermique au profit de modèles électriques et de vélos électriques. En Inde, le plus grand fabricant de scooters, Hero, a des scooters électriques sur le marché et le fabricant Blacksmith Electric travaille sur une moto électrique de classe moyenne assez sexy avec des batteries interchangeables. Au Japon, les quatre grands constructeurs ont annoncé la création d’un consortium pour la technologie des batteries de motos électriques interchangeables. Honda a confirmé son intention de commencer à vendre des scooters motorisés équipés de batteries détachables en Asie du Sud-Est à partir de 2019, à la suite du durcissement des mesures environnementales dans la région.
L’Europe n’est qu’un petit acteur à l’échelle mondiale avec 900 000 motos produites par an. Lorsque les grands marchés d’Asie, de Chine (15 millions) et d’Inde (22 millions) demanderont des deux-roues électriques, les constructeurs se concentreront sur ce point et n’investiront plus dans des motocyclettes à moteur thermique. Déjà, certains constructeurs japonais se concentrent davantage sur les petites et moyennes motos.
L’électricité
Reste la question de la production et de la distribution de l’électricité. La quantité d’énergie utilisée pour les transports représente environ un tiers de la consommation totale d’énergie dans l’UE. Nous avons déjà un problème avec les centrales nucléaires qui vieillissent ou ferment, les centrales au charbon, au gaz et au pétrole qui émettent du CO2 et/ou d’autres émissions polluantes.
L’énergie éolienne et solaire n’est encore qu’une petite partie de la production et les installations ne fournissent pas toujours de l’énergie. De plus, nous verrons une plus grande fluctuation de la demande d’énergie. Les voitures électriques seront connectées au réseau électrique lorsque les gens rentreront chez eux après leur travail, ce qui engendrera un considérable pic de demande d’électricité ! Ces problèmes nécessitent une solution, mais n’empêcheront pas la transition énergétique. Les adeptes du transport électrique estiment que ces problèmes seront résolus à temps. L’une des solutions proposées lors de l’EUSEW 2019 était la "recharge intelligente ", qui signifie que les batteries ne sont pas toutes chargées immédiatement, mais pendant la nuit, probablement aussi avec des tarifs variables selon l’offre et la demande.
Le réseau existant est déjà insuffisant à certains endroits. La solution serait un "réseau intelligent" : il détecterait quand et où la demande d’électricité est ou sera plus forte ou plus faible. Il y répondrait en réutilisant de l’électricité stockée, par exemple, dans des batteries de voiture et/ou en ne chargeant pas lesdites batteries de voiture jusqu’à ce que que la demande redevienne faible. D’autres solutions recherchées sont l’utilisation de batteries de voiture usagées (ce qui arrive déjà), l’énergie marémotrice, l’utilisation de bassins d’eau, etc.
Conclusion
Les leaders mondiaux, l’Union européenne et les gouvernements nationaux visent un transport sans émissions de CO2 en 2050. Pour y parvenir, ils encouragent à la fois l’utilisation d’autres types de transport moins polluants (transports publics, marche, vélo) et l’utilisation d’autres types de carburants.
Les véhicules à batterie (VEB) semblent être l’option la plus probable. Cette transition ne se limitera pas aux voitures. Les motocyclettes et autres véhicules à deux ou trois-roues motorisés en feront également partie.
Avoir un transport propre en 2050 signifie qu’aux alentours de 2030, la transition vers des véhicules fonctionnant avec des carburants non carbonés devrait être achevée. Plusieurs pays et villes ont déjà une politique d’interdiction de la vente de voitures neuves (et probablement de motocyclettes) équipées d’un moteur thermique entre 2025 et 2040. Il en va de même dans des pays qui sont très importants pour l’industrie des motocycles en dehors de l’Europe. Nous devrons nous préparer à ce que, dans une dizaine d’années, il ne soit probablement plus possible d’acheter une moto équipée d’un moteur thermique dans la plupart, sinon la totalité, des pays européens.
Notes de la FFMC
La FFMC regrette pour sa part que le concept même de durable soit bafoué par l’obsolescence programmée qu’implique de devoir mettre au rebut les motos thermiques en bon état de fonctionnement et de devoir fabriquer les motos électriques qui devront les remplacer ! Pourtant, même l’ADEME, dans son rapport rendu fin 2013, a émis des doutes sur l’intérêt écologique de la fabrication de véhicules électriques : consommation d’énergies primaires équivalente, plus de ressources fossiles et rares en jeu pour la fabrication que pour les moteurs thermiques... Il reste bien des questions soit sans réponse, soit dont les réponses ne sont pas satisfaisantes ! En outre, le dernier rapport de l’ANSES montre les bienfaits d’un remplacement des voitures thermiques par des motos pour l’amélioration de la qualité de l’air en ville... Tous ces éléments font douter de la pertinence d’un remplacement total de véhicules individuels thermiques par des électriques, du moins tant que de vraies solutions alternatives n’auront pas été mises en place : à suivre !