Trois points en moins… pour rien !
Mardi 27 novembre en fin de matinée, Thierry passe par la Porte de Vincennes au guidon de sa BMW R 1150 RT. Alors qu’il est arrêté régulièrement à un feu rouge, même pas en interfiles, un policier lui fait signe de se mettre sur le côté pour un contrôle : en effet, sur ce gros rond-point très fréquenté, juste au-dessus du périphérique, la préfecture de police de Paris a entrepris une opération de contrôles ciblés des deux-roues motorisés à laquelle aucun motard ni cyclomotoriste ne peut échapper, des policiers motocyclistes étant également chargés de rabattre tous les p’tits poissons dans la nasse. Thierry est en règle, il n’a commis aucune faute de conduite, il pense que cette formalité ne le retardera pas beaucoup et il présente ses papiers aux agents qui vérifient aussi sa moto… et son équipement. Et là, Thierry se fait verbaliser au motif de « casque non homologué » ! Explication… le casque quasiment neuf et tout-à-fait homologué qu’il porte ce jour-là n’est pas muni des quatre autocollants rétroréfléchissants réglementaires selon le Code de la route français.
À 58 bougies et fort de quatre décennies de moto derrière lui, Thierry n’est pourtant pas un « trompe-la-mort », « un risque-tout », un inconscient comme certains médias se plaisent à représenter les motards pour justifier leurs préjugés. Il se trouve même que ce Thierry-là, c’est l’actuel directeur de publication des Éditions de la FFMC qui éditent Moto-Magazine… Des années auparavant, il fut fonctionnaire à la DRIRE, il a été administrateur bénévole de l’Assurance mutuelle des motards et le temps de loisirs qui lui reste encore, il le passe à faire de la mécanique dans le milieu de la compétition amateur ou pour retaper ses vieilles bécanes. Bref, la sécurité à moto, il connaît !
Pas de bol, ce 27 novembre, il porte un casque qui n’est pas le sien car il fait l’objet d’un essai comparatif dans Moto-Magazine… un casque neuf, homologué, validé par les normes européennes les plus sévères… mais dépourvu des quatre autocollants obligatoires uniquement en France, tout bêtement parce que ces petits stickers restent souvent au fond du carton d’emballage.
Non, c’est vraiment pas de bol d’être tombé sur ces policiers qui mettent un zèle tout particulier à observer le fameux « discernement » rebattu par les technocrates des ministères quand ils nous expliquent la sécurité routière et ses bienfaits… le résultat, c’est 135 € d’amende et trois points en moins sur le permis pour un résultat totalement nul en matière de sécurité routière !
À quelques kilomètres de là, dans la commune de Vincennes, des adhérents de la FFMC nous signalent le même jour un danger qu’ils viennent de découvrir : rue de Montreuil, les services de la voirie viennent d’installer deux potelets rigides au beau milieu de la chaussée. La rue est étroite, limitée à 30 km/h, il y a un contre-sens cyclable, un ralentisseur et contre toutes les règles de l’art en matière d’aménagement des voiries et de prise en compte des usagers vulnérables, ces deux poteaux métalliques, hérissés au beau milieu de la chaussée… névrose priapique du chargé de la voirie de la ville de Vincennes ? Véritable mise en danger du quidam qui se fera surprendre, à vélo ou en deux-roues motorisés, ça c’est sûr !
Bref, entre ces potelets empaleurs posés sous la responsabilité d’une municipalité et l’absence d’autocollants réglementaires sur le casque de Thierry, il y a deux interprétations de la sécurité routière, aussi absurdes l’une que l’autre… le parallèle qu’on puisse faire à partir de ces deux éléments, c’est que toujours non loin de là, mais côté Paris cette fois, de l’autre côté de la Porte de Vincennes, il y a le siège de la Sécurité routière, là où se réunissent les représentants des multiples instances qui discutent de ces questions… là où se retrouvent les ingénieurs du Cerema (centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement) censés promouvoir les bonnes pratiques en matière d’aménagement et les fonctionnaires du Ministère de l’Intérieur qui rappellent aux représentants des associations d’usagers que les policiers ne sont pas là pour piéger et qu’ils font preuve de discernement. Ouais…
En attendant, rappelons que les quatre autocollants rétroréfléchissants réglementaires sur les casques de motos en France ne servent à rien puisque les phares des automobiles n’éclairent pas à la hauteur de la tête d’un motard… mais ils sont obligatoires, c’est ballot. Ne pas en avoir ne met pas plus en danger le motard qui en est dépourvu que les autres usagers. Par contre, réglementation oblige, ne pas en avoir coûte trois points de permis et 135 € d’amende.
Et de l’autre côté, pour une mairie, poser des poteaux n’importe comment sur la voirie, en dépit de toutes les recommandations connues et reconnues au Ministère de la sécurité routière, c’est possible, même au risque de provoquer un accident mortel.
Alors pour être équitable, à qui devrait-on retirer des points ? Au maire de Vincennes, à son chargé de la voirie, au délégué interministériel à la Sécurité routière ou carrément au ministre de l’Intérieur ? À moins qu’on le mette « au coin », avec un bonnet d’âne … heu, avec ou sans stickers rétroréfléchissants, le bonnet d’âne ?