Le 27 mai dernier, Michelle Alliot-Marie, Ministre de l’intérieur, a présenté en conseil des ministres son projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (Loppsi).
Son objectif : lutter plus efficacement contre les infractions les plus graves que ce soit en matière d’espionnage, de cybercriminalité ou de sécurité routière.
La presse parle déjà abondamment de cette nouvelle panoplie ultra sécuritaire et recense les mesures phares qui menaceraient les usagers de la route…
La confiscation obligatoire des véhicules en cas d’infractions graves
Le gouvernement souhaiterait tout d’abord rendre automatique la peine de confiscation des véhicules :
* en cas de conduite sans permis ou malgré une mesure d’interdiction
* en cas de récidive de grand excès de vitesse, de conduite sous l’emprise de l’alcool ou de stupéfiant
* en cas de récidive d’accident mortel ou ayant entrainé des blessures
La peine serait alors prononcée obligatoirement sauf décision motivée du juge.
La confiscation se traduit par la perte totale du droit de propriété sur le véhicule. Celui-ci devient alors la propriété de l’Etat. Il sera vendu ou détruit en fonction de sa valeur. Toutefois, le système a ses limites : pour pouvoir être confisqué, le véhicule doit appartenir au conducteur responsable de l’infraction. La sanction sera donc facilement contournable puisqu’il suffira de mettre le véhicule au nom d’une personne qui ne le conduit jamais.
L’automaticité des sanctions est tout aussi sujette à caution dans la mesure où, en ne permettant pas au juge répressif d’aborder les situations dans leur individualité, elle porte atteinte au principe de personnalisation des peines.
Actuellement, la confiscation est déjà encourue (mais pas automatique) pour les infractions suivantes :
* art R413-14-1 du code de la route : excès de vitesse de plus de 50km/h.
art R413-15 du code de la route : lorsque un détecteur de radar est placé sur un véhicule, celui-ci peut être confisqué.
* art L234-12 du code de la route : la récidive de conduite en état d’ivresse ou sous l’empire d’un état alcoolique avec un taux supérieur ou égale à 0.80g/l de sang et celle du refus de se soumettre aux vérifications de l’état d’ivresse peut entraîner l’immobilisation du véhicule pendant un an au plus.
* art L317-3 du code de la route : circuler avec un véhicule démuni de plaques d’immatriculation ou muni de fausses plaques.
* art 131-6 5° du code pénal : une personne condamnée pour un délit puni d’une peine d’emprisonnement , son ou ses véhicules peuvent être confisqués.
* art R644-2 du code pénal : entrave à la circulation.
* art L321-1 du code de la route : le fait d’importer, d’exposer, d’offrir, de mettre en vente, de vendre, de proposer à la location ou d’inciter à acheter ou à utiliser un cyclomoteur, une motocyclette ou un quadricycle à moteur qui n’a pas fait l’objet d’une réception ou qui n’est plus conforme à celle-ci.
Le trafic de point sévèrement réprimé
Le projet de loi prévoit également de sanctionner les trafics de points. Ainsi, le fait de donner, mettre en vente ou inciter à vendre les points de son permis de conduire serait puni de 6 mois d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.
Là encore, difficile d’apprécier l’efficacité d’une telle mesure puisque le ministère reconnait déjà que le système sera inefficace concernant les échanges de points en famille ou entre amis, ce qui reste le cas le plus fréquent de « trafic ».
Mise en service des anti-démarrage par éthylotest électronique
Enfin, les juges pourraient obliger les conducteurs, contrôlés positifs à l’alcool, à équiper leur véhicule d’un dispositif d’anti-démarrage par éthylotest électronique.
Reste à savoir comment le système serait mis en pratique. Les constructeurs de ces appareils ne semblaient pas, il y a quelques mois, pouvoir garantir la fiabilité de leur matériel à moyen terme. Et comment pourra-t-on garantir que c’est bien le conducteur qui soufflera dans l’appareil ?
Présenté comme une arme absolue contre la délinquance routière, ce nouveau projet de loi, uniquement tourné vers la répression, semble, une fois encore, à côté de la plaque.
Son examen, prévu courant juillet à l’Assemblée Nationale, devrait déchainer les passions. La FFMC ne manquera pas d’intervenir dans le débat et de proposer sa vision de la sécurité routière : non à la répression à outrance, oui à la formation des usagers !
Consulter le projet de loi