C’est comme si nous n’existions pas. C’est dommage car les motos présentent de nombreux avantages par rapport aux autres moyens de transport. En ignorant les motos, les législateurs nationaux et européens et les autorités locales passent à côté d’une occasion de réduire la pollution, les embouteillages et les problèmes de stationnement.
Commençons par quelques exemples pour illustrer ce qui se passe de nos jours. À l’été 2021, la Commission européenne publie une consultation publique sur le transport durable -le nouveau cadre européen pour la mobilité urbaine. Rien de mal à cela bien sûr, mais les motos n’étaient pas mentionnées (pas même les cyclomoteurs électriques). Nous avons alors envoyé une lettre à la Commission, avec nos collègues de la FIMEurope et de l’ACEM, pour souligner que les motos (électriques), ou les deux-roues motorisés comme nous les appelions dans la lettre, sont un complément précieux aux transports publics, à la marche et au vélo. Ces modes de déplacement ne peuvent pas couvrir de manière réaliste tous les besoins de transport et le besoin de transport motorisé privé existera toujours.
Après cela, nous avons eu une réunion avec la Commission européenne où nous avons pu expliquer notre point de vue, mais cela n’a pas beaucoup changé, car après notre échange de vues, il ne s’est rien passé. Autre exemple : toutes les publications de la Commission européenne, webinaires sur la mobilité urbaine, lignes directrices pour les SUMPS (Plans de Mobilité Urbaine Durable), comportent tous le même mantra : « transports en commun, vélo, marche à pied ». La seule exception est faite pour les trottinettes électriques, qui semblent être considérées comme durables (malgré leur durée de vie de quelques mois seulement…) : les automobilistes sont censés abandonner leur voiture au profit d’une trottinette. J’attends toujours de rencontrer le premier automobiliste qui ait fait ça.
Pour finir, un troisième exemple : le 13 janvier 2023, la Commission européenne a publié un manuel intitulé « Network Wide Road Safety Assessment – Methodology and Implementation Handbook ». Dans l’ensemble des 86 pages, les motos ou motocyclistes sont mentionnés une seule fois, dans le cadre de la collecte des données. Les cyclistes sont mentionnés 61 fois, les piétons 47 fois, mais les motos semblent faire partie du « trafic motorisé » avec les mêmes caractéristiques et besoins que les voitures et les camions. En tant que motards, nous savons tous que ce n’est pas le cas.
Ne vous méprenez pas, je ne me plains pas. Après avoir été actif dans la défense des droits des motocyclistes pendant des décennies, j’ai dépassé ce stade. Mais quelques éléments m’ont fait dresser un sourcil : on constate que toute une catégorie d’usagers de la route est simplement ignorée, on voit en même temps qu’on fait la promotion de véhicules assez ridicules comme les trottinettes électriques, on voit que le Parlement européen vote le 31 janvier 2023 une résolution sur l’élaboration d’une Stratégie vélo de l’UE, parce que "plus de voies cyclables dédiées, de places de stationnement pour vélos et un taux de TVA réduit pourraient aider à stimuler l’industrie cycliste de l’UE et faciliter la transition verte", et enfin on voit des bus articulés rouler à Bruxelles aux heures de pointe avec seulement quelques passagers à bord .
À Paris, et dans de nombreuses autres villes européennes, les motocyclistes doivent désormais payer les frais de stationnement comme les automobilistes. Les motocyclistes paient les mêmes frais que les automobilistes pour entrer dans la Zone basses émissions de Londres (London Ultra Low Emission Zone - ULEZ), qui d’ailleurs inclura bientôt tout le Grand Londres, si l’avis du Maire de Londres l’emporte. Il y a des frais de stationnement pour toutes sortes de motos (y compris les cyclomoteurs) à Stockholm. Après avoir vu tout cela, vous commencez à vous demander ce qui se passe. Les décideurs politiques, les législateurs et les conseils municipaux sont-ils si endoctrinés par ce mantra de "transports publics, vélo et marche à pied" que la Commission européenne et les groupes de pression "verts" et de sécurité routière diffusent depuis des années maintenant ? Ne veulent-ils pas envisager l’alternative ou ne la voient-ils tout simplement pas ?
« Nous l’avons souvent dit et nous le répéterons : les motos ne sont pas le problème ; ils font partie de la solution. »
Quelle que soit la raison d’ignorer l’évidence, tous ces décideurs politiques, législateurs et conseils municipaux ratent l’occasion de faire quelque chose contre la congestion, les problèmes de stationnement, la pollution avec une mobilité fiable et abordable en porte à porte. Quelque chose qui ne peut pas toujours être fourni par les transports en commun, le vélo, la marche ou même les trottinettes électriques.
La FEMA a organisé de nombreux tests de mobilité européens dans plusieurs villes d’Europe depuis 2014 : les motos ont été comparées à d’autres moyens de transport pour se déplacer en ville. Nous avons comparé le temps nécessaire de porte à porte. Les motos étaient – à une exception près – toujours, et de loin, les vainqueurs. Toutes ces années et partout. Nous l’avons souvent dit et le redirons : les motos ne sont pas le problème ; ils font partie de la solution.
Écrit par Dolf Willigers , secrétaire général de la FEMA
Pour approfondir le sujet, vu de chez nous : Webinaire du MAP "deux roues motorisés , les grands oubliés de la mobilité" (en français) avec des représentants de la FFMC, de la CSIAM, de la FFM et le député Dmaien Pichereau.