Annoncé pour 2011, reporté à 2012 puis repoussé « à plus tard », le contrôle technique (CT) des cyclomoteurs est toujours en projet… Tant mieux car les motards n’en veulent pas, considérant que le contrôle des cyclos est le dernier verrou à faire sauter pour imposer un contrôle obligatoire à tous les deux-roues motorisés (2RM). Pour les pouvoirs publics, l’affaire semblait simple… sur le papier. Dans la réalité, c’est nettement plus compliqué. D’abord parce que les motards sont capables de se mobiliser contre une mesure qui les concerne et qui leur paraît inadaptée et inutile. Ensuite parce que les technocrates ministériels ont crû malin « de nous faire l’intérieur » en s’attaquant d’abord aux cyclos histoire de se maintenir hors de portée de la colère des motards d’une part et en jouant sur la peur des parents de jeunes roulant en cyclomoteur d’autre part, en brandissant le sacro-saint prétexte de la sécurité routière…
Raté ! C’est raté parce que les motards voient bien « le cheval de Troie » que sera le CT des cyclos pour ensuite l’étendre à tous les 2RM… Non seulement nous sommes capables de manifester massivement contre le CT, mais nous avons aussi démontré que le prétexte de sécurité n’était pas si évident que ce que les pouvoirs publics voudraient faire croire à l’opinion publique. C’est raté aussi parce que les cyclos représentent une catégorie de véhicules très hétérogène, tant sur le plan technique qu’administratif, ainsi que vis-à-vis du retour sur investissement escompté par la filière professionnelle du contrôle technique, ce qui rend sa mise en place problématique.
Décryptage Depuis plusieurs années, les pouvoirs publics veulent imposer un contrôle-technique (CT) des deux-roues motorisés (2RM)… mais les motards représentés par la FFMC n’en veulent pas. Le gouvernement a alors tenté de forcer la passage via un CT des cyclomoteurs, au motif de vérifier si ils n’ont pas été débridés, donc qu’ils ne dépassent pas la vitesse maxi d’origine de 45 km/h (vitesse maxi décrétée en 1968 alors que de nombreux cyclomoteurs ont continué à être fabriqués en France avec des performances d’origine qui leur permettent de dépasser cette vitesse, notamment les cyclos Peugeot et Motobécane). Pour rendre possible le CT des cyclos, il a fallu qu’ils soient tous immatriculés. A partir du 1er juillet 2004, les cyclomoteurs vendus neufs sont immatriculés d’office… restait à faire immatriculer les cyclos « anciens ». Depuis le 1er janvier 2011, tous les cyclomoteurs mis en circulation avant juillet 2004 doivent être immatriculés pour conserver le droit à circuler sur nos routes. Pour les pouvoirs publics, plus rien ne s’oppose, à première vue, à la mise en place du CT des cyclomoteurs. Sauf que plusieurs problèmes apparaissent :
1) Les professionnels des réseaux de CT automobiles qui seront chargé de contrôler les cyclomoteurs doivent investir dans un matériel spécifique, adapter leurs locaux actuellement spécialisés pour contrôler des autos et des petits utilitaires et ils doivent aussi former leurs agents au contrôle des cyclos. Cela représente un lourd investissement par rapport au faible volume de cyclos à contrôler. De plus, le matériel nécessaire pour contrôler uniquement des cyclomoteurs ne sera pas forcément adapté au contrôle de motocyclettes plus lourdes, plus puissantes et techniquement plus complexes… Donc, les réseaux du CT demandent instamment aux pouvoirs publics de pouvoir aussi contrôler les autres 2RM. En attendant, dans les centres de contrôle auto, rien n’est prêt pour contrôler les cyclomoteurs et pour couronner le tout, les propriétaires de cyclomoteurs sont également entrés en « résistance » en se regroupant en collectifs de défense anti-CT… Résultat, alors qu’il était prévu pour entrer en vigueur en 2011 puis en 2012, la mise en place du CT des cyclomoteurs est repoussé à plus tard et le délégué interministériel à la Sécurité routière a déclaré que « le CT des motos n’était pas à l’ordre du jour »… entendez « pour l’instant ».
2) Les technocrates de la sécurité routière ne demandent pas mieux que d’imposer le CT aux motards, sauf que nous n’en voulons pas et que nous sommes en mesure de nous mobiliser, notamment par le recours à des manifestations pour nous y opposer et le faire savoir. Face à l’opinion publique, les politiciens qui prônent le CT des 2RM (quel intérêt ?) essayent de justifier le CT des motos pour des motifs de sécurité routière, argument qui ne tient pas la route puisque toutes les études sur cette question révèlent que l’état du véhicule n’entre pas en cause dans la majorité des accidents dont sont victimes les motards.
3) Que faire avec les cyclomoteurs « anciens » qui dépassent 45 km/h par construction, qui n’ont jamais été « débridés » et qui ont pourtant été homologués comme étant « conformes » par l’administration ? Le problème est d’autant moins simple que dans certaines préfectures, quand le propriétaire d’un cyclo ancien n’a aucun document d’époque à présenter pour en justifier la provenance, la carte grise est établie à la date de présentation de la demande d’immatriculation… une « Mobylette » de 1975 peut ainsi se retrouver avec une date de première mise en circulation au 10 janvier 2012 et doit donc être conforme à la législation des véhicules… de 2012. Stupide, injuste et délicat si des propriétaires déboutés de leur droit à circuler suite à un avis de CT déclarant leur cyclomoteur « non conforme » décident de se retourner juridiquement contre l’État.
4) Un prétexte fréquemment invoqué à l’introduction du CT des 2RM est l’harmonisation de la réglementation européenne : on nous rabâche que pour la France soit en conformité avec les autres pays de l’Union Européenne (UE), nous devrons accepter le CT des 2RM, comme « ailleurs en Europe »… sauf que contrairement à ce que prétendent les lobbies favorables au CT, il y a encore environ un tiers des pays membres de l’UE (8) qui n’ont pas de CT pour les 2RM .
5) De plus, la réglementation européenne prévoit que chaque pays membre puisse rester souverain en matière de réglementation.