En apparence légitimée par la participation de 150 citoyens tirés au sort, la Convention citoyenne pour le climat a été pilotée par des hauts fonctionnaires et des lobbyistes en place. Rien d’étonnant donc qu’au chapitre des « mobilités » qui nous concernent en tant que principale fédération nationale d’usagers de la route en deux-roues motorisés, il n’y a rien de nouveau : toujours plus de restrictions aux déplacements motorisés individuels pourtant indispensables à beaucoup de gens. Notons toutefois que le groupe de travail sur les déplacements propose de laisser circuler les véhicules anciens.
- périphérique parisien - photo G.Mathieu.Motomag
Mise en vedette par les médias, la proposition de 110 km/h sur autoroute a logiquement déclenché une vague de protestations : elle a finalement été écartée par le président de la République qui n’a certainement pas voulu réactiver la contestation qui s’est exprimée contre le 80 km/h. Il aurait été trompeur de ne réagir qu’à cette proposition, dont l’immense majorité des usagers de la route ne voit pas l’intérêt, alors que les électeurs du second tour des élections municipales ont massivement voté pour un monde plus soucieux des questions d’environnement.
La FFMC, qui avait mené la contestation au CNSR depuis 2014 contre le 80km/h a choisi, cette fois, de prendre du recul et d’analyser les propositions portant sur les déplacements, notamment individuels (voir en annexe). A ce titre, les deux-roues motorisés ne font l’objet d’aucune mention spécifique : ils sont hélas considérés de facto comme des voitures !
- embouteillage parisien - photo G.Mathieu.Motomag
Rappelons que les questions portant sur la « mobilité » participent de l’objet même de la FFMC, à savoir défendre et promouvoir l’usage du deux-roues motorisé, en s’inscrivant dans le champ de l’économie sociale et solidaire plaçant l’humain au centre de notre démarche. Par conséquent, l’écologie est aussi notre affaire.
Injonctions contradictoires
Au nom de la « croissance », il faudrait donc être mobile, rapide, disponible… Mais « en même temps » comme dirait le président Macron, les utilisateurs de véhicules sont sans cesse soumis à des contraintes, toujours accusés d’être des pollueurs et des chauffards. Les usagers de la route se retrouvent coincés entre les mâchoires que sont la sécurité routière et l’environnement, les radars de vitesse et les taxes sur le carburant et leurs véhicules… ces injonctions contradictoires (croissance et écologie, rapidité et ralentissement) ont été le déclencheur des Gilets-jaunes. De manifestations en prises de paroles, ils en ont appelé à une « Assemblée citoyenne » pour discuter d’une « transition écologique et de la justice fiscale ». Conseillé par des personnalités médiatiques et des responsables de groupes de réflexion politique proche du gouvernement comme Terra nova, l’État a donc mis en place cette « Convention citoyenne pour le climat », sous le pilotage du Conseil économique, social et environnemental (Cece).
« Pour enterrer un problème, nommez une commission » (G. Clémenceau)
La lettre de mission pour de la Convention citoyenne pour le climat prétend « définir les mesures structurantes pour parvenir, dans un esprit de justice sociale, à réduire les émissions de gaz à effet de serre d’au moins 40 % d’ici 2030 par rapport à 1990 » et ceci dans un contexte où les états riches les plus générateurs de pollution signent des traités de libre-échange, dans une logique de « croissance économique » dérégulée qui n’est jamais remise en cause par ces états, bien au contraire ! Cette commission se voit donc chargée par l’Etat de travailler à ce que l’Etat ne veut pas faire, à savoir conduire une politique économique et sociale plus respectueuse de l’Environnement et des citoyens.
En matière de déplacements, cette « convention » finalement très conventionnelle accouche d’une créature qui a des airs de déjà vu : comme toujours, les ménages ayant les moyens d’acquérir des véhicules récents à faibles émissions reçoivent de l’aide alors que ceux qui ne peuvent pas faire autrement et qui voient leurs droits à circuler toujours plus rognés sont priés de s’adapter comme ils pourront, genre « prenez le métro ou faites du vélo ! »
- rue de Rivoli sans moteurs - photo Mathieu.Motomag
Cette recette sans cesse réchauffée est pourtant contraire aux vœux affichés initialement. En effet, ce qui a conduit à la mise en œuvre de cette Convention citoyenne est la demande populaire de justice fiscale dans les orientations visant à limiter les atteintes à l’environnement planétaire.
Ne jetons pas bébé avec l’eau du bain
Les pistes les plus ambitieuses et les intentions les plus vertueuses pour l’Environnement sont contenues dans les volets traitant des modes de consommation et de production, notamment alimentaires, ainsi que la question de l’artificialisation des sols (lutte contre le bétonnage). Mais bien que cela nous concerne aussi en tant que motards et citoyens, ces domaines ne sont pas directement l’objet de la FFMC.
Une chose toutefois donne de l’espoir : il a fallu une mobilisation citoyenne inédite (les Gilets jaunes) pour forcer le bras des dirigeants afin qu’ils prennent davantage en compte les demandes des citoyens. Si le résultat actuel peut paraitre décevant (mais sous le pilotage de technocrates, cela n’a rien d’étonnant), cela doit nous inciter à ne pas baisser la garde afin d’exiger plus d’équité et une meilleure prise en compte de nos dirigeants. Sur le métier, remettons notre ouvrage !