La mobilité urbaine, un défi social

25 communautés d’agglomérations françaises projettent d’interdire aux véhicules dits « anciens » d’accéder en ville. Ça commence à Paris dès le 1er juillet 2016 où l’interdiction va concerner les voitures de tourisme d’avant 1997 et les deux-roues motorisés (2RM) mis en circulation avant juin 1999 !

Le prétexte invoqué par les promoteurs de cette mise au ban, c’est la « pollution de l’atmosphère » pour laquelle les usagers de la route sont désignés comme les principaux coupables, alors qu’une grande part de celle-ci est provoquée par l’industrie, les épandages agricoles, le chauffage des habitations et le fret routier international.

Les « solutions » proposées aux usagers contraints d’abandonner leur véhicule qui fonctionne encore très bien, c’est d’en acheter un neuf ou d’apprendre à s’en passer. Quel mépris !

Contradictions
Les élus des communes périphériques aux villes interdites devront faire face à des contradictions : prononcer à leur tour des interdictions concernant leurs propres administrés et ceux des communes voisines ou voir leur territoires se transformer en parkings de transit pour les usagers ne pouvant plus entrer dans les zones centrales à « circulation restreinte ».

Autre contradiction, les élus écologistes favorables à ces mises au ban des véhicules dits « anciens » ont par ailleurs fait voter des lois contre l’obsolescence programmée et le « jetable », préférant promouvoir le « durable ». Et pourtant, ces restrictions vont rendre inutilisables des autos et des deux-roues motorisés en bon état de fonctionnement. Dans le même temps, la construction et la production de véhicules neufs génèrent aussi de la pollution… et les récents scandales sur la triche aux émissions polluantes de certains constructeurs d’automobiles démontrent que les véhicules les plus récents ne sont pas forcément les plus vertueux.

Interdiction aberrante des 2RM
Alors que nos voisins européens ayant adopté des zones à circulation restreinte laissent rouler les deux-roues motorisés (2RM) unanimement reconnus comme des éléments favorables à la fluidité des déplacements motorisés, la Ville de Paris veut interdire motos et scooters qui participent pourtant au désengorgement du trafic urbain.

Aucune alternative valable
Alors que Mme Hidalgo, maire de Paris, a déclaré vouloir éradiquer les véhicules diesel de la capitale d’ici 2020, son adjoint aux déplacements, M. Christophe Najdovski s’en prend également aux motos et scooters dont aucun ne roule au gasoil ! En réponse aux inquiétudes de ces usagers face à ces menaces touchant à leurs libertés de se déplacer et leurs besoins pratiques de se rendre à leur travail, la ville de Paris propose à ses seuls administrés une aide financière pour acheter un vélo électrique. Cette « compensation » ne peut satisfaire les usagers venus des proches et lointaines banlieues pour qui il n’y a souvent aucune alternative à celle du véhicule motorisé personnel pour se déplacer vers leurs lieux d’activités.

Un report vers les transports en commun non évalué et des temps de trajets augmentés
Les usagers résidant dans les banlieues contraints de renoncer à leur véhicule sans possibilité de le remplacer vont grossir les rangs des voyageurs des lignes de métro et de RER déjà surchargées, ce qui va en plus augmenter des temps de trajets travail/domicile. Ce report ne semble avoir fait l’objet d’aucune étude.

Mise au ban des plus faibles*
Seront impactés par ces interdictions les personnes les plus modestes, les salariés, résidant loin des villes, les étudiants, les stagiaires, les demandeurs d’emploi, les salariés contraints à des horaires jour/nuit (après l’arrêt des transports en commun), les commerçants… les seuls bénéficiaires de ces mesures qui relèvent finalement d’une prophylaxie sociale imposée seront les constructeurs automobiles, lesquels produisent de moins en moins sur notre territoire !

Déficit d’information chez les élus concernés
De très nombreux élus concernés par ces plans de restriction de circulation témoignent ne pas avoir été informés.

Méthode forte contre solution douce, une menace pour l’Ecologie
La solution serait de promouvoir l’acquisition de véhicules moins gourmands en énergie (c’est le cas des 2RM) et moins émetteurs de particules en comptant sur un renouvellement progressif, phénomène déjà en cours. En adoptant la méthode forte et les contraintes au motif de la protection de l’Environnement, le ministère de l’Ecologie, la Ville de Paris et les 25 communes favorables à ces restrictions prennent le risque d’éloigner encore davantage les citoyens des enjeux écologiques, lesquels n’ont jamais été si cruciaux.

Une menace pour la cohésion des territoires et de leurs habitants
En acceptant ces interdictions de circulation, le gouvernement prend le risque d’accentuer le fossé social entre les habitants aisés des centre-ville et ceux des villes périphériques. Cela risque également d’opposer les territoires, entre modèles urbains et zones péri-urbaines, voire rurales.

*le terme « banlieue » vient du mot « ban », « bannissement ».
La « banlieue », c’est le lieu du ban.